Atelier Lemaire Restauration et Conservation de Meubles Anciens

Champion sans coquetterie de la marqueterie

lanouvellerepublique.fr • 01/04/2016

Restaurateur de meubles, repreneur des ateliers Lemaire, Julien Hebras a obtenu un prix lors du salon du patrimoine à Paris. Son savoir-faire est rare.

 

Agés d’un, deux voire trois siècles, les grands meubles ne sont plus à un an près pour attendre leur tour de restauration. Avec le bois souvent décoloré, parfois décollé aussi, ils patientent dans les 300 m2 de l’atelier Lemaire.
Fin 2015, la vie de Julien Hebras, restaurateur de 33 ans, s’est accélérée : en septembre il reprend cet atelier dans lequel il travaille depuis 13 ans, et en novembre, il remporte, à Paris, au Salon du patrimoine installé dans le Caroussel du Louvre, le prix des Métiers d’art (10.000 €). « Il fallait être à la fois sur la transmission du savoir, et sur les métiers d’art à savoir unique ou rare. », dit-il. Bingo, il remplit les critères.

 

Une machine unique en France

 

Tout son parcours s’est construit sur le passage de savoir, depuis son bac pro en ébénisterie au lycée Arsonval à son CAP de tourneur d’art sur bois passé dans le Jura, à l’étude de la marqueterie à Murat (Cantal) ou à son brevet de technicien supérieur des métiers au château d’Aulteribe (Puy-de-Dôme) puis au CFA du Puy-en-Velay. « Je voulais être apprenti en alternance chez M. Lemaire mais il avait déjà quelqu’un, alors je lui ai demandé de me réserver la place pour l’année suivante. Pendant deux ans, j’ai suivi des formations entre la Touraine et l’Auvergne. »
Cet atelier s’est fait une spécialité de la restauration de meubles Boule, du XVIIe siècle ou ceux, plus nombreux, du XIXe siècle, de nouveau très à la mode. La plupart du temps, les filets en laiton dépassent comme des antennes à cause de la dilatation, la base noire du meuble s’est ternie. « Pour remplacer les écailles de tortues, nous disposons depuis la reprise de l’atelier d’une autorisation spéciale, de la Direction régionale de l’environnement. Il n’existe plus que quelques ateliers, comme la maison Poisson, en région parisienne, à faire ce genre de restauration. »
Pour procéder à certaines opérations délicates, l’atelier s’est doté d’une scie au bois montant de la fin du XIXe siècle. Il n’en existe plus que quatre en France mais grâce à son réglage, celle de Julien Hebras est la seule capable de découper de l’ivoire en 3/10 de mm. « Cette découpe sert aux peintres miniaturistes ou aux confrères, par exemple en Italie, pour lesquels je sous-traite cette opération. » Prochainement, elle servira pour restaurer un cabinet du XVIIe siècle avec des manques de placages d’ivoire.
« Toujours pour transmettre, j’aimerais bien former un apprenti à cette machine. » Constituée à 80 % par des particuliers, les clients de Julien Hebras se trouvent en région parisienne, ou dans un rayon de trois heures. Un client vient même d’Allemagne pour faire restaurer des cartels car il n’existe pas d’aussi bons restaurateurs de meubles outre-Rhin. Un précieux savoir-faire à préserver.

 

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